Autonomie et Coopération

31 mars 2017

Eloge de la temporisation

«  Ce n’est pas le temps qui manque, c’est nous qui lui manquons »* 

C’est d’une grande banalité que de dire que le monde tourne vite et qu’il nous embarque comme des hamsters dans une roue.

Sous l’injonction de l’efficacité, nous courons d’une réunion à l’autre, nous sautons d’un dossier au suivant, nous déjeunons en lisant une note de service, nous travaillons dans le train et nous nous couchons avec un carnet sur la table de nuit pour ne pas laisser s’échapper la dernière idée géniale du jour ou la première pensée brillante du matin.

Nous sommes de plus en plus agiles, flexibles, rapides, dopés à l’adrénaline, prêts à affronter tous les dangers, les situations inédites, la colère des uns, l’apathie des autres. Dans cette agitation permanente du quotidien, vous arrive-t-il comme moi de vous observer ? De faire un pas de côté et d’écarquiller les yeux devant ce bulldozer qui fonce tête baissée et qui étrangement vous ressemble ?

Si oui, posez vous ces deux questions ? Est-ce si urgent ou suis-je en train de me débarrasser de quelque chose que je n’ai pas envie de faire (le sparadrap du capitaine Haddock)? Quels seront les impacts de ma décision ou les suites données à mon action du moment (pour moi et pour les autres parties prenantes)?

En fonction de l’état de perplexité dans lequel vous plonge la réponse, relisez la définition suivante :

Le penseur - Rodin

Le penseur – Rodin

Temporiser
« Différer, remettre à plus tard une
décision, une action, généralement
dans l’attente d’un moment plus
favorable ».
(Larousse)

Temporiser n’est pas renoncer, comme il semblerait bon de le croire dans un environnement de travail qui exige de plus en plus d’instantanéité.

Temporiser peut aussi être l’occasion de potentialiser une idée, une action, de lui donner du sens ou de comprendre quelque chose de nous dans cette manière que nous avons d’évacuer certains sujets.

 

Si notre rapidité d’exécution peut être un réel atout dans notre quotidien de travail, elle peut aussi masquer un manque de distinction de la hiérarchie des enjeux (tout traiter à la demande), une agitation qui nous pousse à ne pas faire ce qui compte réellement dans l’instant (s’occuper de tout plutôt que de travailler sur les sujets de fond), un manque d’autonomie dans la réalisation de notre mission qui nous empêche de demander de l’aide, un délai, des explications.

La temporisation serait alors une forme de sagesse, de recherche du geste professionnel juste, adapté à la situation, pour soi et pour l’entreprise.

  • Paul Claudel – Le partage de midi.